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(fr) Alternative Libertaire #354 (UCL) - Moyen-Orient: Israël étend sa guerre, l'Occident laisse faire
Date
Mon, 11 Nov 2024 17:47:57 +0000
La guerre génocidaire d'Israël contre le peuple palestinien s'étend
désormais au Liban et menace tout le Moyen-Orient après les frappes en
Syrie, en Iran et au Yémen, engageant une escalade de plus en plus
mortifère. Les dangers sont innombrables et exigent d'agir en
internationaliste dignent de ce nom en renforçant et en conscientisant
politiquement le front de la solidarité face aux risques d'extension du
conflit. ---- Après l'épisode de l'explosion simultanée d'appareils
électroniques au Liban et en Syrie qui ont fait 37morts[1]les 17 et
18septembre, une campagne de bombardements israéliens a débuté le
23septembre et depuis le Liban est plongé dans l'horreur. Le 9octobre on
comptait déjà 2141 tué·es et 10900 blessé·es. Avec l'assassinat de
Hassan Nasrallah, Israël décide de faire comme pour Gaza en parlant
d'une guerre pour anéantir le Hezbollah. Les mêmes rhétoriques
médiatiques sont reprises jusqu'en France, en parlant de guerre
«Israël-Hezbollah» comme la guerre «Israël-Hamas». Face au rouleau
compresseur idéologique de la «guerre au terrorisme» dans nos pays, la
voix de la solidarité internationaliste a plusieurs défis à relever.
Le martyr du Liban
Israël ne s'attaque pas au Liban pour la première fois. Après le
Septembre noir (massacre par la Jordanie des camps de refugiés
palestiniens et palestiniennes), la direction de l'Organisation de
libération de la Palestine (OLP) s'installe au Liban. S'ingérant dans la
guerre civile libanaise pour en déloger les factions palestiniennes,
Israël interviendra en 1978 et surtout en 1982 durant l'opération «paix
en Galilée». Avec ses alliés fascistes phalangistes, elle fera la guerre
aux groupes palestiniens, entraînant le massacre de Sabra et Chatila.
L'État d'Israël occupera le Sud Liban durant 17ans et en 2000, le
Hezbollah réussira à le faire partir. S'en suivra une guerre durant
l'été 2006 faisant 1100 mort·es, qui se conclue par une victoire
politique du Hezbollah faisant reculer l'envahisseur. C'est donc dans
une longue histoire d'agression et de résistance des Libanais et
Libanaises que s'inscrit le conflit actuel.
Le risque du jusqu'au-boutisme
Les guerres successives d'Israël dans la bande de Gaza, notamment en
2009 et 2014, ont été des échecs militaires. Les objectifs n'ont pas été
atteints et la résistance en est ressortie renforcée. Cela illustre
l'incapacité des puissances impérialistes à gagner des guerres
d'occupation, comme au Vietnam, en Algérie ou en Afghanistan où chaque
guerre les affaiblit et met en lumière leurs contradictions internes.
Les victoires sont en revanche terriblement meurtrières, telle la Russie
en Tchétchénie[2]. Par le passé, les puissances coloniales ont du
commettre des massacres de masse pour s'imposer et y développer des
colonisations de peuplement, comme lors de la sanglante conquête de
l'Algérie, le génocide des Herreros et Namas en Namibie. À Gaza,
Netanyahou reproduit cette brutalité coloniale en utilisant des drones
et des bombes pour détruire de gigantesques zones urbaines et
déstructurer la société palestinienne dans son ensemble. C'est bien pour
cela que nous parlons de guerre génocidaire à Gaza!
Les États-Unis et l'Europe, sont partagés entre refus d'une escalade et
obligation de maintenir leur soutien à leur sous-traitant stratégique
dans la région. Nethanyouh, fragilisé, fait le calcul, pour se
maintenir, de la fuite en avant en attaquant le Liban et provoquant
l'Iran, au risque d'une escalade sanglante dans la région. L'armée
israélienne vise même les soldats de la Force intérimaire des Nations
unies au Liban (FINUL). Ces casques bleus -censé·es incarner la «paix
internationale»- ont arrêté de patrouiller dans le Sud Liban dès le
début de l'offensive sioniste.
Leur mission, réduite à empêcher l'entrée d'armes non contrôlées par
l'armée libanaise, trahit la vraie nature de cette «paix» imposée: non
pas un équilibre entre les forces, mais une surveillance qui prive les
peuples de leur droit à la résistance. L'ONU, sous couvert de
neutralité, montre à nouveau son incapacité à empêcher les déchaînements
de violence des puissances impérialistes. Antonio Guterres, le
secrétaire général de l'ONU, a été interdit de séjour en Israël pour
avoir simplement appelé à un cessez-le-feu le 2octobre! Son bannissement
par le ministre israélien des Affaires étrangères montre bien que la
voix des Nations unies, lorsqu'elle s'oppose aux intérêts israéliens,
devient inaudible et sans conséquence.
Un impérialisme aux pieds d'argile
Cette scène de désaveu souligne l'illusion de la «communauté
internationale» qui, loin de garantir la paix, accompagne les logiques
de guerre.
La résistance des peuples, renforcée par l'impact du boycott (chute des
investissements, baisse du tourisme, départs massifs des israéliens et
israéliennes, etc.), provoque une explosion des contradictions dans la
société israélienne.
Israël en vient même à recruter des refugié·es pour aller combattre à
Gaza contre des titres de séjour. La grève générale qui a eu lieu en
Israël le 1er septembre, soutenue par le syndicat sioniste Histadrout,
révélateur des divisions au sein même du camp colonial, signe un
ébranlement de la société israélienne. Cette situation pousse l'état
colonial à une fuite en avant, risquant une débâcle militaire au Liban.
À l'image de la bataille de Cuito Canavale en Angola en 1988[3].
Les impérialistes ont des pieds d'argile, il s'agit de ne pas se
démobiliser, ni de se décourager. Si nous n'avons pas été en mesure de
l'empêcher, sans mobilisation mondiale, le massacre à Gaza aurait pu
être pire.
Renforcer la solidarité
L'enjeu est de renforcer la lutte politique en dépassant plusieurs
obstacles, les postures idéalistes comme l'«union des prolétaires
israéliens, palestiniens, libanais et iraniens» qui, dans une attente de
soulèvement du prolétariat colon, mènent souvent à l'inaction. Il faut
également aller au-delà des positions «ni-nistes» et «campistes» qui
renvoient dos à dos des acteurs asymétriques (Israël, Hezbollah, Iran).
Ces positions occultent les résistances populaires à l'État sioniste,
tout en évitant un soutien aveugle de l'«axe de la résistance», et
invisibilise les autres résistances que connaît la région. On n'oublie
pas que le Hezbollah a contribué à écraser la Révolution syrienne ou que
le régime iranien réprime sa population. Notre camp politique est celui
de la résistance des peuples -y compris armée- en Palestine, au Liban,
en Syrie et en Iran. Nous devons rappeler que la France, l'Europe et les
États-Unis n'ont rien à faire dans la région. Il est crucial de soutenir
les mobilisations pour la Palestine, participer à la campagne BDS
(récemment victorieuse contre AXA)[4]et de renforcer la campagne Stop
Arming Israel pour imposer un embargo sur les armes.
Nous devons construire la grève dans les secteurs français impliqués
dans l'effort de guerre israélien, comme en Espagne où une grève
générale a été appelée par des syndicats et ONG[5]. Les déclarations de
Macron sur la suspension des livraisons d'armes qui contribueraient à la
guerre à Gaza, malgré sa rétractation, nous montrent que nous gagnons du
terrain. Enfin, l'unité du mouvement anti-impérialiste doit se
construire contre le système de la «guerre au terrorisme», qui menace
nos libertés, renforce les oppressions systémiques en matière de genre,
de race et de classe, alimente l'islamophobie et les fascismes
contemporains.
Nicolas Pasadena et Antoine (Commission antiracisme de l'UCL)
Notes:
[1]«7 choses à savoir sur les attaques aux bipeurs et talkie au Liban»,
Amnesty International, 23 septembre 2024
[2]Entre 100000 et 300000 personnes mortes selon les ONG: «la Russie
annonce la fin de la guerre en Tchétchénie», Libération, 16 avril 2009
[3]Nelson Mandela a considéré l'échec sud-africain en Angola comme «le
tournant dans la libération du continent du fléau de l'apartheid»:
«Cuba/Angola, la bataille qui mit fin à l'apartheid», Piero Gleijese, 5
septembre 2015
[4]«Communiqué de presse: les militant·es obligent AXA à se désinvestir
de TOUTES les banques israéliennes et du plus grand fabricant d'armes
israélien Elbit Systems.», Campagne BDS France, 21 aout 2024
[5]«Espagne, grève générale contre la guerre génocidaire en Palestine»,
Association nationale des communistes, 29 septembre 2024
Dans / S'informer / AL, le mensuel / Numéros de 2024 / AL de novembre
est en kiosque!
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