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(fr) Alternative Libertaire #351 (UCL) - Palestine: Le football palestinien dans la résistance
Date
Fri, 2 Aug 2024 07:18:48 +0100
Le football est un champ de la résistance autant symbolique que matériel
pour le peuple palestinien, ciment de son unité malgré son éclatement. À
ce titre il est attaqué régulièrement par l'état sioniste, en Palestine
comme à l'international. ---- Toute aspiration nationale palestinienne
est combattue depuis la création d'Israël: la Palestine n'existe pas!
Dès lors hors de question de voir ses couleurs représentées dans les
stades de foot. Pour cela Israël harcèle les équipes locales: le
10novembre 2012 au cours de l'offensive «pilier de défense», le stade de
Gaza est sciemment bombardé et 4 jeunes footballeurs âgés de 6 à 18 ans
sont tués. Le 1er janvier 2014 des soldats ouvrent le feu sans sommation
sur deux nouvelles recrues de l'équipe nationale palestinienne... de 19
et 17 ans. Ayant reçu des balles dans les pieds, les deux jeunes espoirs
ne pourront plus jamais jouer au foot. Les blocus, check-points et
barrages empêchent les sportifs de se retrouver pour jouer ensemble, les
interdictions de se rendre à l'étranger sont récurrentes, des rencontres
sont régulièrement annulées.
L'équipe nationale palestinienne est composée de joueurs cisjordaniens,
gazaouis, palestiniens de 48 ou issus de la diaspora. Cet éclatement
géographique entraîne de nombreux déplacements et incertitudes comme le
confirme l'entraîneur Jamal Mahmoud «je ne sais jamais de quel joueur je
vais pouvoir disposer[...]en général je compose trois équipes possibles
et à la fin on voit qui on peut emmener»[1].
Des origines multiculturelles
La première fédération palestinienne de football est créée par un
immigré juif biélorusse en 1928. Elle regroupe des clubs juifs comme
arabes, mais dès les années 1930 les dirigeants juifs sont majoritaires
au sein conseil d'administration, à partir de 1934 les clubs arabes
n'ont plus leur mot à dire. Pour les coupes du monde de 1934 et de 1938
aucun joueur arabe ne fait partie de la sélection. Les Arabes créent
alors leurs propres structures mais elles sont démantelées durant la
Grande révolte arabe palestinienne de 1936-1939.
Après 1948 l'État d'Israël va faire mainmise sur les clubs de football
des villages arabes d'Israël afin de les contrôler. Rapidement des
tensions apparaissent, en 1964 un match entre deux équipes de villages
juifs et arabes se termine en affrontements entre joueurs et supporters,
le lendemain des centaines d'ouvriers arabes se mettent en grève. Deux
mois plus tard l'Hapoël Bnei Nazareth, première formation arabe
remarquée au sein du championnat israélien, célèbre son ascension en
deuxième division en écrasant 8-0 l'équipe juive de Kiryat Shmona. En
réaction Israël dissout la même année un réseau d'équipe de football qui
tentent de former un embryon de championnat arabe entre plusieurs villes.
Mais nombre de joueurs arabes israéliens, excédés par le racisme des
ligues israéliennes, sont attirés par les clubs nouvellement créés de
Cisjordanie.
Carton rouge au racisme israélien
La fondation d'une ligue palestinienne est actée après les accords
d'Oslo. La fédération palestinienne de foot est intégrée à la FIFA en
1998, devenant la première organisation internationale à reconnaître la
Palestine comme état indépendant. Le 26 octobre 2006 se tient un match
entre «les lions de Canaan» (nom de la première équipe arabe fondée en
1947) et l'équipe jordanienne. La rencontre se solde par un match nul,
mais peu importe le résultat, l'important est ailleurs comme le dit le
footballeur Murad Ismail Said: «une équipe qui vient jouer sur nos
terres c'est une façon de reconnaître l'état palestinien»[2]. Trois
jours plus tard ce sera au tour de l'équipe féminine palestinienne de se
confronter à son premier match international à domicile toujours face à
la Jordanie.
En termes de solidarité internationale, le football est également un
espace de combat avec le boycott sportif mené par la campagne BDS.
Concernant le foot, sera créé la campagne «carton rouge au racisme
israélien»[3]rappelant que la Fifa avait suspendu l'Afrique du sud
pendant 30ans.
La FIFA reconnaît la Palestine
Le 23juillet 2009, Mahmoud Sarsak, footballeur palestinien du camp de
réfugié·es de Balata, est arrêté alors qu'il se rendait à son nouveau
club, il est incarcéré 3ans sans jugements ni inculpation. Il fait une
grève de la faim de 92jours pour être libéré mais sa carrière est brisée
en raison des séquelles de l'internement et des tortures. Une pétition
est alors lancée et signée entre autre par Eric Cantona qui, dans une
lettre, enjoindra à Michel Platini, alors président de l'UEFA à se
positionner «il est temps de mettre fin à l'immunité d'Israël et
d'insister sur les mêmes critères d'égalité et de respect de la
législation internationale que nous exigeons des États»[4]. L'ex-buteur
de Manchester United s'opposera également à la tenue de la coupe
européenne de football des moins de 21 ans en Israël en 2013. En 2010,
Michel Platini menacera bien Israël de ne plus faire partie de l'UEFA
pour toutes ses exactions, mais de la parole aux actes...
En 2016 la fédération palestinienne appuyée par une soixantaine de
député·es européen·nes proteste auprès de l'instance contre 6 clubs de
football installés dans les colonies. La FIFA se mue alors en arène
politique pour la cause palestinienne. Le football est aussi un terrain
d'inventivité de la résistance symbolique de la population. En 2010, les
gazaoui·es lancent leur propre coupe du monde, la Gaza world cup avec
pour mot d'ordre: «si tu ne peux pas aller en Afrique du sud, le mondial
viendra à toi»[5]. Durant deux semaines, seize équipes de la bande de
Gaza dont 14 clubs professionnels se rebaptiseront de plusieurs noms de
pays. «Nous voulons attirer l'attention du monde sur notre isolement et
montrer qu'il y a une vie ici» affirme alors Tamer Qarmout, l'un des
organisateurs de cet événement[6]. La finale opposera la «France» à la
«Jordanie» dans le stade Yarmouk de Gaza, retransmis sur Al Jazeera, les
vainqueurs recevrons un trophée réalisé par des artisans locaux à partir
du métal retrouvé sur les bombardements israéliens. Pour conclure avec
Mahmoud Darwich, «nous serons un peuple lorsque le palestinien ne se
souviendra de son drapeau que sur les stades»[7].
Nicolas Pasadena (UCL Montreuil)
++++
PAS DE GÉNOCIDAIRE AUX JEUX OLYMPIQUES!
Israël se sert du sport pour se promouvoir et se blanchir, avec
notamment sa participation régulière ces dernières années au Tour de
France sous la marque «Israël startup nation» (alors qu'Israël ne
possède aucune fédération nationale de cyclisme!). La campagne BDS
France a ainsi régulièrement ciblé le tour de France ces dernières
années pour dénoncer cette participation. Alors que la grande «fête» des
Jeux olympiques se déroulera pendant qu'on continue à mourir à Gaza, la
campagne BDS espère bien s'inviter et perturber quelque peu les
réjouissances en dénonçant la participation des équipes israéliennes,
réclamant que l'état colonial endosse la même sanction que la Russie,
exclue des Jeux olympiques pour son invasion de l'Ukraine.
N'hésitez pas à rejoindre ce combat cet été camarades!
Notes:
[1]Mickaël Correia, Une histoire populaire du football, La Découverte, 2018.
[2]Idem.
[3]«On peut pas s'en foot», brochure BDS, 2014.
[4]Idem.
[5]Mickaël Correia, op. cit.
[6]Idem.
[7]Mahmoud DARWICH, La Trace du papillon - Pages d'un journal (été
2006-été 2007), Actes Sud, Arles, 2009.
https://www.unioncommunistelibertaire.org/?Palestine-Le-football-palestinien-dans-la-resistance
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