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(fr) CNT-SO - Canicule et travail: droits des salariés et obligations des employeurs en cas de forte chaleur
Date
Sat, 20 Jul 2024 19:03:12 +0100
Comme chaque année, une veille sanitaire a lieu entre le 01er juin et le
15 septembre pour prévenir les risques liés aux fortes chaleurs et
épisodes caniculaires. Ces phénomènes météorologiques affectent aussi
nos conditions de travail et peuvent mettre en danger notre sécurité.
Faisons valoir nos droits: cet article fait le point sur les protections
prévues pour la santé des travailleurs-euses. En cas de problème,
n'hésitez pas à prévenir le syndicat! ---- N'oublions pas qu'il ne
s'agit que de droits minimums: par exemple le droit du travail ne
précise pas encore de seuils de température précis pour déclencher des
mesures de protection! Nous devons revendiquer des protections encore
plus fortes face à des phénomènes météos toujours plus intenses et
précoces! ---- Au regard des articles L. 4121-1 et suivants et articles
R.4121-1 et suivants du code du travail, les employeurs ont la
responsabilité de prendre les mesures nécessaires visant à assurer la
sécurité et protéger la santé des travailleurs de leurs établissements,
en tenant compte notamment des conditions climatiques. Des mesures plus
ciblées sont aussi prévues. Voir ci-dessous les mesures qui s'imposent
aux employeurs dans le cadre du droit du travail et de différents textes
réglementaires.
....................................
A savoir: la canicule est déclarée en cas de dépassement de seuils de
température le jour et la nuit pendant 3 à 5 jours d'affilé. Attention,
ils sont différents suivant les départements (Voir le tableau joint).
....................................
Les niveaux de vigilance météorologique:
Le niveau de vigilance vert: période de veille sanitaire (activée
automatiquement du 1er juin au 15 septembre).
Le niveau de vigilance météorologique jaune correspond à un pic de
chaleur: exposition de courte durée (1 ou 2 jours) à une chaleur intense
présentant un risque pour la santé humaine, pour les populations
fragiles ou surexposées notamment du fait de leurs conditions de travail
ou de leur activité physique. Il peut aussi correspondre à un épisode
persistant de chaleur: températures élevées (indicateurs
biométéorologiques IBM proches ou en dessous des seuils départementaux)
qui perdurent dans le temps (supérieur à 3 jours).
Le niveau de vigilance météorologique orange correspond à une
canicule: période de chaleur intense pour laquelle les IBM atteignent ou
dépassent les seuils départementaux pendant 3 jours et 3 nuits
consécutifs, et qui est susceptible de constituer un risque sanitaire
pour l'ensemble de la population exposée.
Le niveau de vigilance météorologique rouge correspond à une
canicule extrême: canicule exceptionnelle par sa durée, son intensité,
son extension géographique, à fort impact sanitaire pour tout type de
population, et qui entraîne l'apparition d'effets collatéraux notamment
en termes de continuité d'activité.
Pour s'informer, voir la: carte de vigilance Météo France
........................................
Mesures à appliquer pour les employeurs
(Source: ministère du Travail)
Afin de limiter les accidents du travail liés aux conditions
climatiques, quelques mesures simples doivent s'imposer aux employeurs.
Tout employeur doit:
- Intégrer au «document unique» les risques liés aux ambiances
thermiques et adopter les mesures de prévention permettant d'assurer la
santé et la sécurité des salariés (Article R4121-1);
- Dans le secteur du BTP, mettre à la disposition des travailleurs un
local de repos adapté aux conditions climatiques ou aménager le chantier
de manière à permettre l'organisation de pauses dans des conditions de
sécurité équivalentes (Article R4534-142-1). Mettre à disposition des
travailleurs trois litres d'eau potable et fraîche au minimum par jour
et par salarié (Article R4534-143).
- Mettre à disposition de l'eau potable et fraîche (Article R4225-2);
- Renouveler l'air de façon à éviter les élévations exagérées de
température, dans les locaux de travail fermés où les travailleurs sont
appelés à séjourner (Article R4222-1).
- S'assurer que le port des protections individuelles et les équipements
de protection des engins sont compatibles avec les fortes chaleurs;
- Prendre les mesures organisationnelles adéquates pour que les travaux
se fassent sans exposer les salariés;
- Prévoir des aides mécaniques à la manutention;
- Veiller à ce que les conducteurs d'engins et de véhicules ne soient
pas exposés à des élévations de température trop importantes;
- Porter une attention particulière aux jeunes travailleurs. Rappel: Un
jeune (moins de 18 ans) ne peut pas effectuer des travaux l'exposant à
une température extrême pouvant nuire à la santé, par exemple, travaux
extérieurs sur les chantiers (Article D4153-15).
Attention, les locaux climatisés doivent être évacués si la température
intérieure atteint ou dépasse 34 °C en cas de défaut prolongé du
renouvellement d'air (recommandation CNAM R.226).
Mesures à appliquer en cas d'alerte «vigilance rouge» par Météo France
Il appartient à l'employeur, au titre de son obligation de sécurité, de
procéder en phase de vigilance rouge à une réévaluation quotidienne des
risques encourus par chacun des salariés en fonction:
- de la température et de son évolution en cours de journée;
- de la nature des travaux devant être effectués, notamment en plein air
ou dans des ambiances thermiques présentant déjà des températures
élevées, ou comportant une charge physique,
- de l'âge et de l'état de santé des travailleurs.
En fonction de cette réévaluation des risques:
- l'aménagement de la charge de travail, des horaires et plus
généralement de l'organisation du travail doivent être ajustées pour
garantir la santé et la sécurité des travailleurs pendant toute la durée
de la période de vigilance rouge.
- la liste des salariés bénéficiant du télétravail doit être réexaminée,
en prêtant une attention particulière aux femmes enceintes, aux
personnes souffrant de pathologies chroniques ou en situation de
handicap, etc.
Si l'évaluation fait apparaître que les mesures prises sont
insuffisantes, notamment pour les travaux accomplis à une température
très élevée et comportant une charge physique importante, par exemple
travaux d'isolation en toiture ou de couverture, manutention répétée de
charges lourdes, l'employeur doit alors décider de l'arrêt des travaux.
Recours des salariés au regard de la mise en oeuvre des mesures
incombant à l'employeur
Le salarié qui:
- constaterait qu'aucune disposition n'a été prise,
- considérerait que les mesures mises en oeuvre apparaissent
possiblement insuffisantes au regard des conditions climatiques constatées,
- se verrait opposer un refus par l'employeur quant ses demandes
d'aménagement et, en premier lieu, s'agissant de la mise à disposition
d'eau fraîche et de locaux suffisamment aérés, serait fondé à saisir les
services d'inspection du travail qui apprécieront si les circonstances
climatiques et la situation dans laquelle il était placé justifiaient ou
pas la mise en oeuvre des dispositions prévues aux articles R4225-1 et
suivants du code du travail.
En fonction de la taille de l'établissement, le salarié dispose
également de la possibilité de solliciter le CSE ou à défaut le délégué
du personnel.
Dans ces conditions l'exercice du droit d'alerte et de retrait peut être
envisagé (contacter le syndicat auparavant).
Rappel: selon les articles L.4131-1 du code du travail, le travailleur
dispose d'un droit d'alerte et de retrait en cas de danger grave ou
imminent pour sa vie ou sa santé. Il alerte immédiatement l'employeur à
propos de toute situation de travail laissant supposer qu'elle présente
un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé. Il peut se retirer
d'une telle situation sans encourir de sanction ni de retenue sur son
traitement ou son salaire. Le délégué du personnel ou représentant du
personnel au CSE dispose lui aussi de ce droit d'alerte de l'employeur
(article L.4131-2).
Canicule et droit de retrait en jurisprudence
Bien qu'aucune règle et qu'aucune température limite ne soient précisées
dans le Code du travail, il est reconnu qu'au-delà de 28 °C pour les
activités en extérieur et nécessitant un effort physique le droit de
retrait du salarié, sans mise en place du plan canicule par l'employeur,
est justifié.
Pour les salariés travaillant dans des bureaux et avec une activité
sédentaire, et toujours sans application du plan canicule, le niveau est
fixé à 30 °C.
Exemples de droits de retrait validés par les juridictions sociales
Un aide-couvreur a activé son droit de retrait à plusieurs reprises
en raison des fortes chaleurs. Il est licencié pour faute grave. Il
conteste son licenciement. La Cour d'appel déboute le salarié de ses
demandes mais la Cour de cassation casse l'arrêt notamment au motif que
l'employeur ne contestait pas que le refus de travailler du salarié
trouvait son origine dans la chaleur exceptionnelle des jours en
question (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 1 avril 2009,
07-45.511, Inédit). Dans cette affaire, la Cour d'appel de Nancy qui a
rejugé l'affaire après la cassation, a considéré que: «eu égard à la
canicule ayant sévi sur la France à cette période[aout 2003], le salarié
avait pu valablement exercer son droit de retrait, l'employeur ne
pouvant ignorer les conditions de travail de ses salariés astreints à
travailler en pleine chaleur sur les toits d'immeubles». La Cour a
considéré que le licenciement devait être déclaré nul (Cour d'appel de
Nancy, chambre sociale, 26 février 2010 n°09/01034).
Un salarié manutentionnaire dans une entreprise de fruits et
légumes était en droit d'exercer son droit de retrait dès lors que
l'entrepôt était envahi de mouches et de moucherons en raison des fortes
chaleurs (Cour d'appel de Rennes, chambre prud'homale 5, 11 septembre
2007, n°366,06/0271).
Idem pour un salarié travaillant dans un local sans isolation
contre la chaleur (Cour d'appel de Besançon, chambre sociale, 17 juillet
2008 n°jurisdata 2008-374523).
Exemples de situations où le droit de retrait n'a pas été retenu
Divers salariés travaillant dans un atelier avaient exercé leur droit de
retrait après avoir subi une première journée de travail à 39° la veille
et avoir constaté qu'il faisait déjà 29° à 6h30 du matin.
Les juges du fond, pour contraindre l'employeur à rémunérer la période
correspondant au retrait des salariés retiennent les températures
précédemment énoncées ainsi que certaines mesures visant à lutter contre
les fortes chaleurs auraient été prises tardivement par l'employeur.
La cour de cassation casse l'arrêt au motif que ce simple constat est
«impropres à caractériser que les salariés avaient, au moment où ils
avaient cessé le travail, un motif raisonnable de penser que la
situation présentait un danger grave et imminent pour leur vie ou leur
santé, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au
regard des articles L. 4131-1 à L. 4131-3 du code du travail» (5 avril
2018, Cour de cassation, chambre sociale, Pourvoi n° 16-26.802).
Indemnisation ou récupération des heures perdues pour cause de canicule
en cas d'activation du niveau orange ou rouge par Météo France
Récupération des heures non travaillées
Les dispositions relatives à la récupération des heures perdues pour
cause d'intempéries peuvent être mobilisées. A défaut d'accord, la
récupération des heures ne peut avoir pour effet d'augmenter la durée du
travail de plus d'une heure par jour, ni de plus de 8 heures par semaine;
Recours au dispositif d'activité partielle
Une indemnisation peut être sollicitée par toute entreprise ayant du
interrompre le travail au titre du dispositif «activité partielle»
(article R. 5122-1 du code du travail).
Dispositif spécifique pour les entreprises du BTP
En cas d'interruption du travail, les employeurs doivent s'adresser
prioritairement à la caisse régionale de congés intempéries du BTP
(article L. 5424-8 du code du travail).
Attention: les trois dispositifs évoqués ci-dessus ne sont pas cumulables.
https://cnt-so.org/canicule-et-travail-droits-des-salaries-et-obligations-des-employeurs-en-cas-de-forte-chaleur/
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