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(fr) Socialisme Libertaire - Notre amoralisme
Date
Thu, 19 May 2022 20:10:52 +0100
E. Armand: "Notre point de vue - Notre «amoralisme»", L'En dehors 16 no.
279 (mi-février 1935).----- «Où qu'on se tourne, l'horizon individuel se
trouve limité par cette borne qu'on nomme morale ou moralité: morale
religieuse ou sociétaire, morale bourgeoise ou prolétarienne. Partout
des poteaux portant interdiction de franchir. Bien sur, énonce un
premier moraliste, car «sans morale, pas de société». Evidemment,
renchérit un second: «à la société seule, il appartient de déterminer
règles et fins». Et si je demande en quoi consiste la moralité, forme
concrète de la morale, un troisième me répond: «la moralité est
sacrifice et régularité». Ces messieurs nous la baillent belle. Où
découvrir, non l'avenue goudronnée et kilométrée, mais le sentier perdu
qui mène là-haut, sur la cime «en dehors», là où on ignore l'air empesté
par le prohibé et l'interdit. Si las des discours des défenseurs du
«sacrifice et de la régularité», je me tourne vers les partisans du
retour aux lois naturelles, on me parlé d'instinct social, de vice et de
vertu. C'est à désespérer.
Le point faible de toutes les morales sociétaires, même basées sur
l'instinct, c'est leur a priorisme - leur rigidité doctrinale dont l'un
ne peut s'évader, que cette rigidité se conçoive dans l'intérêt de
l'ensemble ou au profit de la nature. L'un suffoque sous le poids des
obligations imposées à l'avance sans qu'on lui offre possibilité de les
discuter et de les résilier s'il n'y trouve pas son compte. On nous
enregistre, on nous immatricule, on restreint nos possibilités de
circulation, d'expansion, d'expression, d'association sous toutes sortes
de prétextes dorés. On nous comprime, on nous opprime, on nous inculque
dès l'aube de nôtre vie des mystiques qui annihilent en nous toute
aspiration à nous révéler des uniques. Et pour spécieux ou utilitaires
que soient les motifs exaltés, nous n'en vivons pas mieux, nous n'en
sommes pas plus heureux, nous ne nous en réalisons pas davantage et nous
ne sommes pas plus surs du lendemain.
Qu'est-ce que la morale? - qu'est-ce que la moralité? Selon nous,
l'établissement d'une règle de conduite individuelle où les rapports de
l'un avec autrui sont conditionnés par la recherche de son intérêt
véritable. Et cet intérêt véritable, à notre sens, c'est la faculté pour
chacun de pouvoir se livrer au plus grand nombre d'expériences voulues
en vue de permettre à son être de réaliser la plus grande somme de
possibilités suivant qu'il y est déterminé. Il est contre l'intérêt de
l'un d'accepter à l'avance une règle de conduite dont il ignore si elle
lui procurera ou non le bonheur. C'est a posteriori, après essai, qu'il
est loisible à l'un de se rendre compte si telle ou telle ligne de
comportement «accomplira» où non son déterminisme. Tout milieu agencé de
telle sorte qu'il ne permet pas cet essai est un milieu tyrannique et
arbitraire, qu'il se fonde sur un décalogue, des lois écrites ou des
commandements gravés «dans les coeurs».
Dans la morale universelle se cache une intention bien arrêtée de
ramener l'un à un niveau indépassable. C'est pourquoi on trouvera
toujours en état d'insurrection - ou de légitime défense - contre cette
morale, quiconque a pris conscience de son déterminisme particulier. La
morale universelle est une fiction. La morale, dans l'histoire, a varié
selon le climat, l'état de civilisation, les conditions économiques, les
idées religieuses, les desseins des détenteurs du pouvoir politique. La
morale, chez l'individu, varie selon les gouts, les désirs, la
constitution physiologique, le mécanisme psychologique, etc. Il n'est de
morale avantageuse que la morale particulière: morale individuelle ou
morale d'association - contrat résiliable et ne liant pas à jamais le
contractant.
On sait notre thèse: nous n'éprouvons pas le moindre désir d'imposer à
autrui ou de faire partager par autrui notre déterminisme particulier,
et ses modalités de réalisation. Nous sommes toujours prêts à traiter
avec autrui sur la base du respect de nos déterminismes mutuels. Et
c'est ce qui donne à notre mouvement son cachet bien spécial.
Qu'ont donc, après tout, à nous présenter de si mirobolant les partisans
du conformisme? Le conformisme est un principe de stagnation, de
momification, de misonéisme, De fout ces jeunes gens que les actualités
du cinéma nous montrent défilant au pas en uniforme, acclamant l'Etat
totalitaire, un dictateur, le parti dominant ou anxieux de le devenir,
de fous ces jeunes gens monte une odeur de vieillesse, de rance, de
cadavre. Ils n'ont de révolutionnaires que le nom. S'ils sont prêts à
sacrifier leur vie - leur bien le plus précieux - c'est pour conserver
où maintenir un régime, une conception, une doctrine, une «entité» en un
mot. Ce sont des conservateurs - agités, si l'on veut, mais conservateurs.
Certains moralistes, je le sais, veulent faire dépendre la morale de
l'expérience originale de la personne: c'est à l'un de se créer sa
morale ‘individuelle. Fort bien. Mais il faut admettre les conséquences
de cette proposition, qui sont de situer la personne en état
d'opposition avec toute morale sociétaire (codes religieux où civils, etc.)
On sait qu'il n'est pas dans notre dessein de nous opposer aux lignes de
conduite qui sont antagonistes aux nôtres. Adversaires de tout archisme,
nous ne demandons pas mieux que de laisser autrui se comporter comme bon
lui semble, dès lors qu'il nous accorde la réciproque. Nos chemins
diffèrent: Suivons chacun: celui où nous pourrons le mieux nous
accomplir. N'empiétons pas sur nos trajets respectifs. Poursuivons,
chacun de notre côté, nos réalisations particulières. Rassemblons,
chacun de notre côté. sans nous nuire, ceux dont le déterminisme est
analogue au nôtre. Est-il un programme plus raisonnable et plus pacifique?
*
Vice, Vertu, que viennent faire ces vocables quand il s'agit de lois
naturelles? Il y a des contingences cosmiques, météorologiques,
telluriques auxquelles je ne puis échapper - mais pas plus que je ne
considère une «perversion» de vivre en ne m'alimentant que des produits
de laboratoires, je ne considère une dépravation de faire de «l'art par
plaisir», de «l'érotisme par plaisir», etc. Je pense en écrivant cela à
un long article paru dans le supplément littéraire de Vivre-Santé (1).
Mais qui me prouvera que ce n'est pas une «perversion» que d'offrir
voluptueusement le côté postérieur du corps aux effluves du soleil ou à
la caresse des vagues? Est-ce vice ou vertu de se protéger contre la
foudre, la grêle, le raz de marée? N'est-ce pas une dépravation de
s'éclairer quand le, jour est tombé, de circuler sous l'eau, sur terre,
dans l'air à l'aide de machines compliquées? Est-ce vice où vertu que
cultiver la terre, consommer du pain, du vin ou du jus de fruits, élever
du bétail, édifier des chaumières ou des gratte-ciels? On irait loin
dans cette direction. À vrai dire, il n'y a pas de délimitation possible
entre le naturel et l'artificiel, le vice et la vertu, 1 normal et
l'anormal. Ce sont des entités, des abstractions, des catégories de
l'inexistant.
Se rabattre sur l'instinct, sur les instincts ne suffit pas pour douer
de réalité «le vice» ou «la vertu». Qu'on prenne par exemple, le
soi-disant instinct de reproduction qui peut, à une époque où abondent
les subsistances et la sécurité, se confondre avec l'instinct de
conservation; or, cet «instinct de reproduction» peut fort bien, dans
certaines circonstances, entrer en conflit avec l'instinct de
conservation d'un milieu ou d'un groupe donné et ce n'est pas plus une
contrôle que de se refuser à considérer comme dépravés les primitifs
lorsqu'ils pratiquaient l'avortement, l'infanticide, l'exposition,
l'abandon. Ils ignoraient les moyens mécaniques de prévenir les
naissances indésirées et, dans tous les cas, cela montre qu'ils
s'insouciaient de ce fameux instinct de reproduction qui se résume tout
simplement en un besoin d'excrétion. Le temps m'empêche de dépiauter
l'instinct de conservation qui est bien plutôt désir de conquête et
désir de durée que désir de se conserver tel qu'on est.
L'instinct de conservation - ou désir de conquête, d'expansion,
d'expérimentation, de durée, etc.. - s'affine et se raffine à mesure que
l'être humain se cérébralise, enregistre les sensations dans les
détails, jauge, distingue et apprécie le plaisir. Ce désir primitif
devient désir de joie, désir de jouissance, désir de volupté, désir de
répétition du plaisir. Sans cela, «la conservation» de l'individu
apparaît déficitaire, mutilée, tronquée, insuffisante. Lorsqu'Aristippe
de Cyrène, il y a 24 siècles, enseignait l'obéissance passive aux
instincts de notre nature (ou de notre réalité sensible), il ne
concevait pas cette «obéissance» comme un refoulement, un sacrifice,
mais comme une recherche incessante du plaisir, plaisir du moment,
plaisir actuel, plaisir vivant, plaisir immédiat, plaisir en évolution
continuelle: édoné én kinései.
Je le réitère, perversion et dépravation égalent fantômes et illusions.
On n'est perverti ou dépravé que dans la mesure que l'on s'imagine tel.
Un nudiste, un exhibitionniste, un néo-malthusien, un uraniste, un
zooéraste, un autoérote, une fellatrice, un cunniliaguiste, un
mixoscope, un travesti ne sont des pervertis ou des dépravés que par
rapport à une morale sexuelle imposée et extérieure à eux. S'ils ne se
sentent ni des pervertis ni des dépravés, ils ne le sont pas en réalité.
Tout individu, toute association qui, dans le domaine sexuel ou érotique
(pour rester sur le terrain de Vivre) accepte et pratique le modus
vivendi de la «liberté égale», c'est-à-dire fonde ses rapports avec
l'extérieur Sur le principe de la non-immixtion, de la:
non-intervention, du non-empiètement dans ou sur le comportement
d'autrui. (isolé ou association) - n'est ni pervers, ni dépravé, ni
vicieux, ni anormal, quelles que soient sa moralité ou ses moeurs, même
alors que toutes les lois et tous les catéchismes prétendraient le
contraire.
Je conclus enfin:
J'approuve la philosophie d'Aristippe de Cyrène. J'entends jusqu'à la
dernière heure me tenir dans un état cinétique, à l'affut de
l'expérience qui me procurera un nouveau plaisir, une jouissance
nouvelle. Je déteste la douleur, le refoulement me fait horreur. Je suis
hédoniste. Il ne s'agit pas ici d'instruction - mais de la formation
d'un caractère individuel tel que son possesseur puisse tenter toutes
les expériences et réaliser toutes ses possibilités sans se sentir
diminuer, c'est-à-dire sans perdre la maitrise de son déterminisme. Tel
est notre «amoralisme» qui ignore péché et sainteté, vice et vertu,
pureté et perversité, mais non la maitrise de soi et la libre entente.
(1) No. du 15 janvier dernier.
E. Armand
https://www.socialisme-libertaire.fr/2022/05/notre-amoralisme.html
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