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_The.Supplement
{Info on A-Infos}
(fr) En développant le concept de révolution (pt) - nouvelle traduction
From
N@ndo <nonda@free.fr>
Date
Sun, 19 Jan 2003 06:56:58 -0500 (EST)
_________________________________________________
A G E N C E D E P R E S S E A - I N F O S
http://www.ainfos.ca/
http://ainfos.ca/index24.html
_________________________________________________
Deuxième version corrigée et allégée de quelques bourdes qui se trouvent
sur la première version éditée précédemment
N@ndo
_______________________________________
EN DEVELOPPANT LE CONCEPT DE REVOLUTION
« ...les masses sont spontanément en marche vers la construction d'un
socialisme de base, sans leaders charismatiques, sans parti d'avant
garde illuminée ». »
Dans un article précédent (voir A BATALHA, n°191) je soulevais la
question de la révolution aujourd'hui.
Ce thème, à force d'être usé par de multiples personnes, dans des
contextes si divers, exige une brève définition afin de préciser le sens
donné à tout ce que nous allons ensuite décrire. Ainsi, « révolution »
sera compris comme transformation sociale profonde et durable qui place
l'ensemble de l'humanité en état de jouir de tous les biens naturels et
sociaux de façon libre et égalitaire.
La nécessité éthique de la révolution ne me paraît pas susceptible d'être
remise en cause : en ce début de millénaire nous avons les moyens
matériels pour que toute l'humanité dispose de conditions de vie décentes
et même un peu plus, mais les inégalités dans la répartition de la
richesse et du pouvoir se sont poursuivies de telle sorte que la misère
sous toutes ses formes et sous toutes les latitudes n'a fait que se
répandre. Ceci, sans affecter le bien-être d'une minorité qui possède
tout et tout gaspille, avec un total manque de pudeur, indifférente aux
valeurs d'humanisme et de solidarité qu'elle continue de proclamer en
discours, uniquement pour endormir la mauvaise conscience (lorsqu'elle
existe).
La nécessité de révolution n'est pas pour autant mécanique, comme on
pourrait en déduire à partir d'une lecture du type « matérialisme
historique » de l'évolution du capitalisme et de ses contradictions. Si
c'était le cas, il serait alors bête d'essayer de la précipiter ou de la
déchaîner, et l'on n'aurait qu'à attendre son avènement comme s'il
s'agissait d'un phénomène naturel, aussi inévitable que le passage d'une
comète traversant le système solaire, par exemple.
Le risque d'extinction que court l'humanité n'est aujourd'hui mis en
cause par personne ayant deux doigts de jugeote ; au-delà de la menace
d'une déflagration nucléaire généralisée, que personne ne peut considérer
comme exclue dans les temps les plus proches (tant qu'il y aura des
arsenaux nucléaires), il existe d'autres « bombes »... la « bombe
démographique » et la « bombe écologique ». La planète peut devenir un
lieu inhabitable à cause de la cécité ou de la myopie de ses habitants.
En conséquence de la dégradation chaque fois plus dramatique des
conditions de vie, et non en raison d'un quelconque déterminisme aveugle,
beaucoup d'insurrections vont se produire qui forceront le système à
faire usage des moyens répressifs avec une « main chaque fois plus lourde
». Il ne s'agit d'aucune « prophétie », mais uniquement du constat de
l'inévitabilité, résultant des circonstances suivantes :
- L'existence d'une unique superpuissance mondiale à laquelle les
autres puissances se voient forcées de céder.
- L'épuisement à court terme des ressources pétrolières susceptibles
d'être
facilement exploitées et dont les prix vont par conséquent grimper
jusqu'au point de rendre inévitable une substitution par un autre type de
technologie n'ayant pas recours aux combustibles fossiles.
- La misère croissante dans ce que l'on nomme le Tiers et le Quart
Monde,
provoquée par une politique économique et sociale prédatrice des
ressources, totalement destructrice des structures sociales, et
conséquence de l'application de politiques ultra-libérales sous la
houlette du FMI, de la Banque Mondiale et de l'OMC.
- L'impossibilité de maintenir la population des pays dits développés
occupée à un niveau au dessus du seuil « d'agitation sociale ». Ceci
parce que les grands centres industriels sont en train de se délocaliser
vers des pays périphériques dans lesquels une main d'oeuvre semi-esclave
est soumise aux conditions d'exploitation les plus violentes (voir à ce
propos le cas des « maquiladoras » à la frontière Mexique/USA ou les
conditions dans lesquelles un capitalisme sauvage est en train de
s'installer en Chine), assurant une grande partie de la production
industrielle nécessaire à la consommation des pays riches.
Comme la transition vers un autre type de société se trouve bloquée par
la domination militaire quasi absolue de la puissance impériale
planétaire, les sociétés périphériques connaîtront toutes sortes
d'insurrections, de coups d 'état, de guerres inter et intra frontières,
sans d'autre conséquence que l'aggravation de la misère et de la violence
que subiront des populations sans
aucune défense. La guerre prendra chaque fois davantage la forme de
longues guerres civiles entre groupes ethniques ou d'autres rivaux,
uniquement stoppées en fonction du bon vouloir et des intérêts des
saigneurs impériaux. Pour ce qui est des conséquences du réchauffement
global, elles se feront hélas dramatiquement sentir avec plus d'intensité
d'abord dans les zones tropicales en aggravant la sécheresse dans les
régions déjà désertiques comme le Sahel (et d'autres) et en augmentant la
fréquence des ouragans et autres phénomènes climatiques dévastateurs dans
des régions comme les Caraïbes ou les côtes de l'Océan Indien.
Quant aux soit-disant « démocraties occidentales », celles-ci révèleront
chaque jour davantage leur face totalitaire, par le recours aux
technologies dans le but d'exercer la répression sélective des
dissidences, par la vidéosurveillance généralisée, par la violation de la
correspondance électronique, etc...
La raison profonde de cette dérive sécuritaire - et on peut toujours
agiter devant nous l'alibi d'une guerre contre le « terrorisme » - est
bien trop évidente : les armées de sans-emploi générées par la
transformation soudaine des moyens de production (révolution
technologique), associée à la délocalisation massive des unités de
production vers des pays où le coût du travail est plus bas, ne pourront
pas continuer à bénéficier de systèmes de sécurité sociale et de retraite
en déficit chronique et auxquels les bourgeoisies « nationales »
respectives refusent de contribuer pour la part qui leur incombe (voir la
fuite massive aux impôts promue par une
constellation de « paradis fiscaux », non seulement dans des lieux
exotiques, mais également dans plusieurs pays de l'Union Européenne
elle-même : le Portugal avec Madère ; le Royaume Uni avec Gibraltar ; le
Luxembourg...)
La majorité des personnes des groupes sociaux opprimés, dans les pays
riches comme dans les pays pauvres, verra ses conditions de vie se
détériorer. Les jeunes verront s'éloigner chaque jour davantage un futur
digne de leurs désirs légitimes face au cauchemar de cette civilisation
décadente. La révolte se développera, inévitablement. L'inconnue
consistera donc à vérifier, non pas s'il y aura plus d'agitation sociale,
mais plutôt dans quelle mesure cette agitation sociale débouchera dans la
solution d'une crise structurelle du capitalisme, sans perspectives de
dépassement à l'intérieur de ses propres limites.
En effet, aux 19ème et 20ème siècles les crises cycliques du capitalisme
étaient absorbées et « résolues » dans une large mesure, grâce à
l'expansion de la domination du capitalisme dans sa périphérie (colonies
d'abord et pays neo-colonisés ensuite) ou même dans des guerres
inter-impérialismes qui permettaient de faire fonctionner de nouveau à
plein régime une industrie auparavant paralysée par l'effet d'une crise
de surproduction (cas le plus évident : la crise de 29-32 qui s'est «
résolue » dans la 2ème guerre mondiale).
Aujourd'hui cependant, quelles parties de la planète reste-t-il à
exploiter ? Quelles parties de la planète ne sont pas soumises à une
forme ou une autre d'économie capitaliste ? Seulement la Chine dite «
communiste », bien que totalement acquise au capitalisme dans sa version
la plus rude et cruelle, rejetant beaucoup de millions de paysans affamés
sur le marché aux esclaves des grandes villes industrielles pour
construire une structure d'entreprises capables de rivaliser avec les
autres puissances industrielles asiatiques. Le continent africain est
abandonné à son sort, réduit à une simple réserve de matières premières,
les conglomérats transnationaux ne révélant aucun intérêt pour y
implanter des usines.
Quelle possibilité existe-t-il pour qu'une guerre soit la soupape
d'échappement et la bouée de sauvetage d'une industrie en crise ?
Les guerres contemporaines se caractérisent par leur façon de cibler des
populations civiles totalement sans défense, massacrées par les
« valeureux » soldats à des centaines de kilomètres de distance, la
fameuse guerre zéro morts (du côté impérialiste bien entendu). Ce fut le
cas en ex-Yougoslavie, en Afghanistan et ce sera bientôt le cas en Irak
(ou plutôt : .... c'est le cas, puisque l'Irak est soumis à des
bombardements meurtriers depuis la fin de la guerre de 91, qui touchent
régulièrement des agglomérations, des zones industrielles, etc. sous le
prétexte de « raser des usines d'armes de destruction de masse »). Par
conséquent, la guerre détruira des ressources de façon toujours plus
efficace, et ne permettra aucun développement, puisque ces pays seront
placés en situation de marginalité totale pour ce qui concerne les
marchés, aussi bien en tant que producteurs de biens industriels que
comme consommateurs. Il suffit de voir la situation de paupérisation dans
laquelle sont restés les pays de l'ex-Yougoslavie, pour ne citer qu'un
exemple.
L'augmentation des dépenses militaires de la part de l'unique
superpuissance qui subsiste (augmentation qui dépasse les dépenses des
années les plus tendues de la « guerre-froide »), est venue colmater une
profonde dépression sur le point de précipiter les USA dans une situation
de marasme (voir la chute de la bourse de New York et surtout du Nasdaq
entre avril et décembre 2000).
Mais colmater n'est pas résoudre : les produits de l'industrie
d'armement
sont seulement destinés, ou bien à être employés (en générant plus de
destruction), ou bien à être stockés, mais ils ne se destinent pas à
fournir des éléments susceptibles d'être utiles à d'autres activités
industrielles, ou alors à une échelle infime uniquement. Le résultat
final est une énorme saignée de ressources de toute sorte (financières,
de matières premières, de capacité scientifique, de main d'oeuvre
spécialisée, etc.) dans un but qui n 'est ni productif ni reproductif, ce
qui revient à dire qu'au bout du compte cela n'augmentera pas les profits
dans le système capitaliste pris dans son ensemble, même si dans un
premier temps cela permet de générer de grands profits immédiats pour les
industries associées à cette course à l'armement de la « guerre des
étoiles ».
Pour maintenir leurs profits, les grands conglomérats mettront en oeuvre
deux processus : le pillage pur et simple des ressources, comme ils le
font déjà actuellement, mais à une échelle encore plus vaste, et ils
dépossèderont toujours plus les populations des pays « développés » des
bénéfices et acquis sociaux qui découlent de « l'Etat providence », mis
en place pendant les trois décennies d'expansion capitaliste à l'issue de
la 2ème guerre mondiale.
Nous avons donc le capitalisme en train de creuser les conditions de son
anéantissement, et se maintenant uniquement grâce à une machine à
réprimer devenant chaque jour plus monstrueuse, employant des moyens de
surveillance de tout et de tou-te-s, tout en gardant cependant, et si
possible, les apparences de la « démocratie », de façon à maintenir la
population endormie.
Le capitalisme en état de décadence accélérée ne se souciera pas du
destin de l'Argentine, ou même de celui de deux ou trois « Argentines »,
car ses habitants désespérés ne compteront guère dans ses calculs
hégémoniques. A partir du moment où elles ne constituent pas une menace
directe à la survie du système dans sa globalité, il est probable que
seront tolérées des zones « d'entropie » aux marges du système,
simplement contenues, car leur réhabilitation serait trop coûteuse et ne
présenterait pas d'utilité pour le capital.
A l'intérieur des sociétés dites développées, les zones de misère, avec
leurs corollaires de violence, de prostitution, de drogue, etc. vont se
maintenir et augmenter, car cela rendra plus facile le contrôle social
global. En effet, les populations auront en permanence devant elles le
spectre hideux de leurs semblables réduits à la condition de déchets
humains. Quelle meilleure dissuasion de la contestation sociale ? Quel
meilleur instrument pour gérer la soumission, par la peur panique de ce
qu'impliquerait la perte du misérable gagne-pain ?
Cette évolution ne sera cependant pas indéfinie, car au-delà d'un certain
degré, les mécanismes d'oppression deviendront trop insupportables,
déclenchant la prise de conscience sociale des jeunes générations en
contact avec la brutalité des pouvoirs.
La recherche d'alternatives a déjà commencé, et ceci bien avant Seattle.
En vérité, nous pouvons situer la nouvelle ère du combat anti-capitaliste
à partir du 1er janvier 1994, avec l'émergence de l'insurrection armée au
Chiapas, menée par les zapatistes.
A partir d'ici, le mouvement anti-capitaliste contemporain - étiqueté
mouvement « anti-globalisation » par les média (n.d.t. :
anti-mondialisation » en France) - n'a cessé de croître, opposant des
défis
toujours plus grands aux Etats et aux grandes corporations, non tant par
les manifestations elles-mêmes, qui ne représentent aucun danger immédiat
pour
l'ordre » en vigueur, mais plutôt par l'effet de perte de légitimité de
cet
« ordre » qu'occasionnent ces mêmes actes collectifs : les « happenings »
libertaires d'une jeunesse qui, plus que jamais (bien plus qu'en mai 68),
sait ce qu'elle rejette et s'assume comme créatrice d'un autre futur où
il n'y aura plus de place pour l'exploitation de l'homme par l'homme ni
pour la dévastation de la nature.
Au niveau local, ces groupes et réseaux alternatifs sont en train de
développer des communautés de base, non visibles parce qu'ostracisées par
les média, mais qui n'en sont pas moins actives et en train de semer les
graines d'autres modes de vie, d'une autre culture, d'autres valeurs. Les
laquais du pouvoir - qu'ils soient de droite ou de la gauche autoritaire
- vont continuer à dénigrer ce mouvement, le présentant comme « chose de
marginaux ». Cependant, le processus est en marche et nous allons
assister à une floraison de projets dans de nouveaux domaines, à
l'exemple de ce que l'on constate déjà dans certains secteurs, depuis les
infos (cas des Indymédia et d'autres projets sur Internet) jusqu'aux
squats, transformés en centres sociaux, centres d'une culture
alternative, où se développent de nouveaux modes de fonctionnement, où
l'on assume pleinement une autre forme d'être ensemble, avec des
collectifs qui se régissent par la démocratie de base, par l'absence de
hiérarchies, par leur ouverture et entraide, formant des réseaux
solidaires entre eux.
Les formes de démocratie de base que représentent les assemblées de
quartier à Buenos Aires et dans d'autres villes d'Argentine sont
également
prometteuses dans la mesure où elles rassemblent des voisins autour de la
résolution de questions concrètes. Là-bas, dans ce cas, c'est la survie
elle-même qui est très souvent en question. Dans ce pays également, des
usines occupées et autogérées montrent - à ceux qui en douteraient encore
- l'adéquation de ce que les libertaires ont toujours défendu.
Ces évènements sont d'autant plus notables que le pourcentage de
libertaires est assez faible en Argentine(*), et l'on ne peut donc pas
leur attribuer un rôle déterminant, du moins dans le déclenchement de
l'insurrection. Nous pouvons donc constater, au Nord ou au Sud, à l'Est
ou à l'Ouest, que, malgré les énormes moyens de répression mis en oeuvre
sous prétexte de
lutte anti-terroriste », les masses sont spontanément en marche vers la
construction d'un socialisme de base, sans leaders charismatiques, sans
parti d'avant-garde « illuminée ».
Ainsi est en train de se construire un nouveau concept de révolution,
d'action révolutionnaire en rupture avec le capitalisme et à la recherche
d'alternatives totalement en dehors, et même en opposition, aux schémas
routiniers des gauches autoritaires du passé.
Manuel Baptista
Note
(*) Bien qu'il s'agisse d'un des pays où le syndicalisme libertaire a été
dominant au sein du mouvement ouvrier (avec la confédération FORA, membre
de l'AIT), les survivants directs de ce passé sont rares, à cause du
péronisme et de la dictature sanglante de Videla. Les rangs des
libertaires argentins d'aujourd'hui, proviennent, pour une large part, de
dissidences en rapport avec des organisations marxistes ou péronistes de
gauche.
Traduit du portugais par N@ndo
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