A-Infos (fr) La guerre se mène à tous les niveaux

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Au sommaire du numéro 128 - avril 2003 de Courant alternatif

- Edito (cf ci-dessous)
- Guerre : la propagande prise à son propre piège
- Social : unité d'action contre les suppressions d'emploi et la
précarité - Trois mois de lutte dans l'archéologie préventive
- Soutenir l'Ecole Emancipée
- Dossier environnement (8 pages)
- La Claaac contre les saigneurs du G8
- Contrôle et soumissions
- Pays Basque : parti indépendatiste interdit
- Liberté pour Marco Camenish
- Et les rubriques habituelles


Edito

Comme tout le monde s'y attendait, les armées américaines, appuyées par
leurs alliés, ont envahi l'Irak, au mépris total des immenses mouvements
de protestation dans le monde entier. Les processus de globalisation
économique, politique et sociale voulus par les institutions
internationales (OMC, FMI, etcŠ) ont trouvé leur aboutissement
provisoire. Cette guerre n'est pas seulement une nouvelle intervention
impérialiste telle qu'en a déjà connu la planète ; elle vise clairement à
enraciner dans la durée la domination des Etats-Unis et de leurs trusts,
à tous les niveaux, et en balayant radicalement les obstacles rencontrés
sur cette voie. Le
capitalisme a toujours faim, faim de profit, de conquêtes, d'hégémonie.
Le profit est la loi, le marché est la règle. L'avertissement est donné à
toutes celles et ceux qui voudraient contester cet ordre. La guerre
militaire accompagne la guerre économique et idéologique et risque de
s'installer durablement dans toutes les contrées de la planète. Les
peuples irakiens, mais aussi kurdes, palestiniens sont aujourd'hui en
première ligne de ce front. D'autres fronts seront ouverts, et le sont
déjà en Europe, en Afrique, en Asie.

Outre la défense des intérêts économiques et, en particulier, pétroliers,
le message de cette guerre est aussi de nature stratégique : il s'agit de
dessiner les contours de l'ordre post-guerre froide et post-11 septembre
que les Etats-Unis entendent façonner. Avec la théorie de la « guerre
préventive » définie le 20 septembre 2002 sous prétexte d'en finir avec
le terrorisme, l'enjeu est d'instaurer un ordre sécuritaire, une
neutralisation générale des populations, un pouvoir intégral qui ne se
fonde plus que sur la prévention, la dissuasion, le contrôle et qui mette
fin à tout événement possible. La loi suprême, c'est la sécurité des USA
et tant pis si, au passage, la recherche de cette sécurité absolue
aboutit à faire vivre les autres dans une insécurité absolue.

Ceux qui croyaient encore à la légalité internationale qu'aurait incarné
l'ONU en sont pour leurs frais. Ceux qui avaient emboîté le pas de l'Etat
américain dans la guerre en Afghanistan feignent aujourd'hui d'endosser
les habits du pacifisme. Chirac le premier, lui qui envoie son armée en
Côte d'Ivoire, se fait le champion de l'Europe du capital face aux
Etats-Unis et se grise de l'image cocardière du chef épris de légalité
qui tient tête au puissant. Il n'hésite pas à passer des alliances
nauséabondes avec la Chine qui opprime le Tibet, la Russie qui
ensanglante la Tchétchénie, chacun de ces Etats défendant  ses intérêts
nationaux propres. L'Etat français cherche en fait à obtenir un rôle dans
la réorganisation de l'ordre mondial en tant qu'acteur impérialiste et à
avoir son gain dans les missions économiques et diplomatiques de
l'après-guerre irakienne.

La guerre se mène à tous les niveaux. Celle qui est  portée contre l'Irak
a pour conséquence d'occulter d'autres conflits impérialistes dans le
monde et de détourner l'attention des conflits sociaux internes à chaque
Etat. C'est le cas aux Etats-Unis, où sévit une grave crise économique et
sociale. En France, - et c'est aussi vrai de tous les Etats européens-,
le gouvernement et le patronat ont le souci de tirer parti du contexte de
tension
internationale pour tenter de faire avaler toujours plus d'austérité,
d'inégalités et de répression. Ils espèrent que, pendant quelques mois,
l'attention se portera ailleurs et que perdurera le réflexe d'union
nationale d'une lecture gauloise de la crise irakienne, qui fait de
Chirac un Astérix face aux Américains. « Les bruits du monde accélèrent
nos calendriers » déclare Raffarin, et le Medef pousse le gouvernement à
faire passer au plus vite la potion amère des réformes en attente :
retraites, fonction publique, privatisations, assurance-maladieŠ, pendant
que se succèdent les licenciements massifs, que s'opèrent les coupes
claires dans les budgets sociaux et que s'accroît la précarisation.
Mais la combativité sur le front social est loin d'être anesthésiée. Les
mobilisations en cours, nombreuses et diversifiées, semblent même
chercher à se débarrasser des corporatismes étriqués, véritables
impasses. Des initiatives se prennent pour organiser non seulement la
généralisation mais aussi la jonction de luttes aujourd'hui encore
éclatées, signe que la conscience se fait plus aiguë et plus massive de
l'urgence à se réapproprier l'espace public, à infléchir le cours des
événements et à ouvrir des brèches dans la domination hégémonique du
capital globalisé.

Pays basque, 25 mars 2003


"Courant alternatif" # 128 - avril 2003.
24 pages. 2,3 euros.

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