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(fr) France, Alternative Libertaire AL Novembre - histoire, 1976: Entre espoir et désillusion, la renaissance de la CNT espagnole (en, it, pt)
Date
Wed, 7 Dec 2016 10:46:21 +0200
Dans l'Espagne débarrassée de l'ombre de Franco, un vent de liberté traverse la Péninsule.
Après 40 ans de régime dictatorial, la centrale syndicale libertaire, la CNT, sort de la
clandestinité. Témoin et acteur de cette renaissance, Angel Bosqued, secrétaire
international de la CGT espagnole, revient sur ces années d'espoir d'un renouveau
libertaire au pays de Cervantes, sur ses temps forts, ses contradictions et ses échecs.
---- Alternative libertaire: Quel est le contexte social et politique de l'État espagnol
au cours des dernières années du régime franquiste? ---- Angel Bosqued: Des changements
fondamentaux se sont produits au cours des années qui ont précédé la mort de Franco, le 20
novembre 1975. Mais, jusqu'à la fin de l'année 2000, on trouve des traces du franquisme
chez des personnalités significatives de la société espagnole.
Pour nous en tenir aux années 1970, après une phase de développement commencée en 1957,
l'économie espagnole connaît une crise importante, avec une inflation qui atteint les 17 %
et des taux de chômage entre 9 et 16 %.
Dans le contexte géopolitique de guerre froide, les traités d'«amitié et de coopération»
avec les États-Unis sont renouvelés (installation de bases militaires contre la fourniture
de lait en poudre). Sur le plan politique, l'ETA assassine le chef du gouvernement Carrero
Blanco à Madrid le 20 décembre 1973. Toute une série de nouveaux assassinats de policiers
et de militaires suit.
En 1975, on note malgré tout un certain fléchissement du régime. Pour la première fois,
l'Église, qui exerce à cette époque un pouvoir de fait essentiel, se prononce publiquement
en faveur des droits d'association et d'expression. Cette même année, le catalan, le
basque et le galicien sont reconnues comme langues co-officielles aux côtés du castillan.
Le 18 novembre, les Cortes, une sorte de parlement désigné par le parti unique, décrètent
la fin de la présence espagnole au Sahara occidental.
Côté répression par contre, le régime demeure inflexible et continue à assassiner ses
ennemis. Parmi les dernières exécutions, soulignons celles de Puig Antich (garroté le 2
mars 1974 avec le condamné de droit commun Heinz Chez), de Paredes Manot «Txiki» âgé de 21
ans et d'Angel Otaegui, 33 ans, tous deux militants de l'ETA, fusillés à Burgos. Ce même
jour, José Luis Sànchez Bravo, 22 ans, Ramon Garcia Sanz, 27 ans, et José Humberto Baena
Alonso, 24 ans, membres du FRAP, sont fusillés à Hoyo de Manzanares. N'oublions pas non
plus que le 3 mars 1976, à Vitoria, la police a lancé des bombes lacrymogènes à
l'intérieur d'une église et tiré sur ceux qui en sortaient, tuant cinq personnes qui
participaient à une lutte syndicale.
Le 20 novembre 1975, la mort de Franco s'accompagne, selon les personnes, de quelques
jours de fête, de silences, de doutes et de changements au sein de l'appareil d'État. Un
nouveau roi, désigné préalablement par Franco, exerce le pouvoir monarchique malgré la
survivance temporaire des vieilles institutions qui assuraient le contrôle totalitaire.
Ainsi, Juan Carlos Ier sera chef d'État, mais non pas chef de gouvernement. Ce n'est que
le 15 juin 1977, après avoir ouvert la voie à la légalisation des partis politiques,
qu'auront lieu les premières élections législatives à un parlement «démocratique». Le 6
décembre 1978, une nouvelle constitution, toujours en vigueur, est adoptée par référendum.
Peux-tu revenir sur les premières années d'activité de cette CNT reconstituée?
Jusqu'en 1951, la CNT et des groupes libertaires avaient maintenu une action clandestine
très active, avec notamment une grève sauvage des tramways à Barcelone.
Le 27 mars 1976, l'acte de renaissance officielle de la CNT a lieu au cours d'un meeting
public à San Sebastián de los Reyes à Madrid. Néanmoins, le moment fort de cette
renaissance est surtout, le 2 juillet 1977 à Barcelone, le meeting de Montjuic, qui attira
plus de 300 000 personnes. Un meeting qui impressionna tout le monde et qui marquait le
retour officiel de la CNT dans le paysage social ibérique.
Malgré le succès du meeting de Montjuic, la réalité de reconstruction de notre centrale
était moins évidente. L'activité de la CNT était fragile. Comme celle d'ailleurs de toutes
les organisations du mouvement social dans cette période postfranquiste. Nous sortions
d'une dictature de quarante ans et les envies de liberté étaient immenses. En même temps,
nous faisions face à une violence très importante de l'extrême droite qui n'entendait pas
perdre ses prérogatives.
La création de sections syndicales, de syndicats locaux, la présence au sein des
assemblées, des manifestations, comme les combats de rue contre la police ou les
fascistes, étaient continus. En partant de zéro, la CNT compta rapidement pas moins de 300
000 adhérents et adhérentes, dont 100 000 en Catalogne.
Face à cette croissance vertigineuse de nos effectifs, le fait est que nous n'étions pas
préparés pour digérer autant de personnes qui venaient de traditions diverses. On y
retrouvait: des syndicalistes de lutte de classe, la génération des vétérans de 1936
attaché-e-s à leur héritage historique mais aussi des camarades issu-e-s des luttes autour
des thématiques plus en lien avec le monde des années 1970, à savoir: l'homosexualité, le
nucléaire, le féminisme.
Le premier congrès de la CNT, à Madrid en décembre 1978, donna lieu dans ce contexte à une
rupture brutale. S'y est concrétisé un vrai choc générationnel entre la vieille garde et
la nouvelle génération, notamment autour du débat sur la question des élections
syndicales. La génération de 1936 entendait de ne pas déroger au dogme de refus des
élections syndicales. Quant à nous, nous avions la conviction qu'il s'agissait, en lien
avec la nouvelle réglementation du droit syndical, de l'unique moyen de construire et
consolider une organisation anarcho-syndicaliste de masse, en prise avec la réalité.
Un autre événement fut à l'origine de notre perte de vitesse, puisqu'il provoqua au départ
d'une bonne partie de nos affilié-e-s, c'est l'affaire Scala. En marge d'une manifestation
organisée par la CNT, à Barcelone le 15 janvier 1978, contre le Pacte de la Moncloa qui
allait, avec le soutien des syndicats réformistes (UGT, CCOO) flexibiliser le marché du
travail, des cocktails Molotov sont lancés contre un théâtre: la Scala. Un incendie s'y
déclare et quatre salariés du théâtre meurent, avec, parmi eux, un adhérent de notre
organisation. La CNT est accusée d'être à l'origine de l'incendie. Elle est stigmatisée
par la presse qui la montre du doigt. En fait, après enquête et procès, il s'agissait
d'une manipulation policière visant à discréditer le mouvement libertaire, alors en pleine
expansion. Elle permettait, en tout cas, de justifier la répression à notre encontre. Le
mal est fait: en interne, la CNT se déchire.
Quelles relations la CNT avait-elle au niveau international dans ces années 1970? Et quel
fut, dans les faits, le soutien qu'apportèrent des organisations soeurs à la
reconstruction de celle-ci?
Les relations internationales étaient avant tout en lien avec la CNT en exil ainsi qu'avec
les sections de l'internationale anarcho-syndicaliste: l'Association internationale des
travailleurs et des travailleuses (AIT). Les soutiens que recevaient la CNT durant les
années de dictature étaient nombreux. Ils émanaient de la CNT en exil, depuis ses sections
au Mexique, Venezuela, Argentine, en Angleterre et Canada, qui nous envoyaient de
l'argent, des livres, des journaux.
Mais le soutien le plus effectif depuis l'extérieur venait de l'exil proche, avec pour
centre névralgique Toulouse et sa nombreuse colonie libertaire espagnole. La CNT en exil
de cette ville apportait surtout un soutien au niveau stratégique et idéologique.
Ce soutien de la CNT en exil fut décisif: il nous a permis, nous, jeunes libertaires qui
militions ici en Espagne, de reconstruire le fil conducteur de notre histoire de par ce
lien avec des camarades qui avaient vécu la révolution de 1936. Grâce à eux, nous avons
acquis la conviction qu'il était possible de reconstruire dans la Péninsule quelque chose.
Nous recevions aussi le soutien de la petite CNT française comme des secteurs
anarcho-syndicalistes et libertaires qui militaient à la CFDT, à FO ou à la CGT.
Un autre soutien déterminant fut celui de la centrale syndicale libertaire suédoise: la
SAC. Stockholm nous envoyait beaucoup d'argent pour la propagande (tracts, journaux,
affiches), sans rien nous demander en échange. La SAC nous enseigna des idées modernistes
du point de vue du paradigme idéologique, avec notamment une vision très constructive de
ce que devait être l'internationalisme. Une vieille tradition de soutien d'ailleurs de la
part de nos camarades suédois, puisqu'ils et elles furent nombreux et nombreuses à venir
combattre les armes à la main dans les milices libertaires de 1936.
Le soutien de la SAC a, en tout cas, été important dans notre processus de reconstruction.
Un soutien permanent puisqu'il s'étendit jusqu'à la fin des années 1980.
Si je devais, enfin, détacher une personnalité dont le soutien, fut précieux c'est Rudolf
De Jong. Responsable de l'Institut international d'histoire sociale d'Amsterdam, il a joué
un rôle important pour regrouper et préserver nos archives, en particulier celles qui
avaient trait au rôle de la CNT pendant la période 1936-1939.
De la crise de la CNT de ces années naîtra la CGT. En quoi, pour toi, la CGT d'aujourd'hui
est-elle l'héritière de la CNT?
De la CNT fondée en 1910 sont nées à l'aube des années 1970 des cadres militants, qui vont
bien au-delà de la seule CNT de 1976. Une CNT à peine reconstituée mais qui connaît une
vraie rupture trois ans plus tard. La CNT, suite à ses conflits internes, implose en 1979.
De cette implosion sortent une CNT-AIT dite «orthodoxe» (dominée par la génération de
1936) et la CNT dite «rénovée» (portée, elle, essentiellement par la nouvelle génération
militante). La CNT rénovée, en 1984, deviendra la CGT. Ce changement de sigle ne sera pas
de notre fait: il sera la conséquence d'un procès que nous a attenté le secteur orthodoxe.
On peut néanmoins se demander jusqu'à quel point la justice bourgeoise n'a pas
délibérément favorisé par ce jugement le secteur orthodoxe qui était, de fait, le moins
enclin à se développer syndicalement. Car, derrière cette histoire de sigle, il y avait un
vrai enjeu autour, notamment, du retour à la CNT de ce que l'on appelle le patrimoine
historique, à savoir les locaux syndicaux confisqués à la centrale syndicale libertaire
par le régime franquiste en 1939.
De la CNT des origines, la CGT se revendique de sa filiation historique et idéologique. De
même, nous nous inspirons de son fonctionnement horizontal: où les adhérentes et
adhérentes construisent et prennent les décisions à la base. Nous poursuivons, en outre,
l'idée d'expropriation des moyens de production et leur autogestion par les travailleurs
et travailleuses. Nous portons, enfin, l'idée un peu folle que l'émancipation des
exploité-e-s sera l'oeuvre des exploité-e-s eux-mêmes, sans intermédiaire, ni avant-garde
qui parle en son nom. Une émancipation qui ne peut exister que par une rupture radicale
car, pour nous comme pour nos aïeux, le capitalisme n'est pas réformable.
Propos recueillis par Jérémie (AL Gard), traduction de Jérémie et José
http://www.alternativelibertaire.org/?Il-y-a-40-ans-entre-espoir-et
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